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21 décembre 2013 6 21 /12 /décembre /2013 03:18

taram afficheGénéralement, le simple fait d'évoquer Disney entraîne notre imaginaire juvénile, celui qui ne s'est pas perdu en cours de route mais simplement dissimulé dans un coin pas si reculé de notre esprit stressé d'adulte, vers des vallées heureuses et des contrées où l'amour rime avec princesses et princes se déclarant leur flamme avec pudibonderie anglaise et le tout sans équivoque où scènes de baiser. Bien sûr, ce fameux contact entre héros et héroïne peut parfois se révéler indispensable, à l'instar de la Belle au bois Dormant où il occupe même la première place.


Disney destine le plus souvent ses œuvres au jeune public,celui qui doit se faire emmener par au moins un adulte au cinéma pour pouvoir profiter pleinement de son histoire rose bonbon de type Dinosaure (pour les plus récents) à Oliver et Compagnie (pour les plus anciens). Les images sont alors faites pour être belles , l'histoire se base sur des liens solides entre personnages pour pouvoir aider le héros candide à mener à bien une quête personnelle d'identité ou pour sauver le monde, comme pour Chicken Little.


Le studio a donc ainsi connu plusieurs étapes dans sa construction, alternant le génie sous l'égide du Disney lui même mais aussi les périodes creuses avec la tripotée des dessins animés faiblards et limites ennuyeux comme Rox et Rouky. Les années 80 -90 ont été placées sous le sceau d'un renouveau de bon aloi (Petite sirène et autres Roi Lion) même si certains classiques d'aujourd'hui sentent malgré tout le repompage sur des œuvres phares d'autres pays.


On s'est ensuite essayé à séduire un public plus adolescent via La Planète au trésor ou Atlantide l'Empire perdu pour finir par comprendre qu'un bon métrage pouvait posséder plusieurs niveaux de lecture. Pixar n'est pas anodin dans l'affaire mais a permis à la souris aux grandes oreilles de sortir du marasme entamé avec la production de moultes suites d'anciens gros succès au scénario insipide et à la réalisation pour le moins bâclée (le Bossu de Notre Dame 2, La belle et la bête / clochard 2...).


Ne nous leurrons pas pour autant. La section film en prises de vues réelles a suivi le même chemin. Quid d'une réalité certaine dans Copains des Neiges et Underdog? Il reste hors de question de heurter le jeune public avec des scènes de mort ou des décors traumatisants. L'école fantastique ,est un exemple type où les méchants ne meurent pas , tout comme Croc Blanc ne prenait pas le parti de démontrer la dureté de la vie dans le Yukon, se contentant d'amener par le rire le seul cadavre de tout le film.


Une ligne de conduite artistique sur laquelle la firme s'est calée tout au long de son existence. Le Maestro avait pourtant mis en place des méchants d'envergure, cruels, iconoclastes et provoquant certains frissons dans l'exécution de leurs basses besognes (Blanche Neige, la Belle au Bois dormant et dans une certaine mesure Pinocchio) ou dans l'accomplissement de leur folie( Cruella D'enfer). Mais ensuite? Qui se souvient du Bad guy d'Oliver? De celui de Basile détective privé? Ce ne sont pas forcément les premiers qui viennent à l'esprit. La Bande à Picsou , le Roi Lion, Hercule ou bien encore Lilo et Stitch, la Petite sirène appartiennent à la génération intermédiaire , au silver age, mais entre les deux périodes ? Le livre de la Jungle proposait Shere Kahn mais celui ci , tout comme le prince Jean de Robin des Bois étaient d'abord montrés , voire suggérés sous un jour inquiétant avant d'être finalement tournés en ridicule dans une scène finale parfois absurde.


Idem pour la partie film. Ruppert Everett est ridicule en Docteur Mad et les trois sorcières d'Hocus Pocus ne risquent pas de remonter un niveau prodigieusement bas. Le Trou noir et Tron , bien qu'appréciables et avec des connotations futuristes ne parviennent pas non plus à sortir du lot car si on se souvient facilement de Jeff bridges, qui se rappelle du jeu nuancé de David Warner ?

 


Pourtant, des tentatives d'exploration d'un autre univers, assez proche de l'héroïc fantasy ont été tentées d'un l'un et l'autre de ces domaines , malheureusement avec peu de succès au box office, et c'est d'autant plus regrettable que pour une fois, le spectateur était considéré comme un adulte en devenir, du moins comme un enfant vivant avec son temps et sachant pertinemment que des nains ne rodaient pas à l'extérieur dans l'espoir de vous offrir des diamants. Un simple rappel de l'introduction de le Last Action Hero devrait suffire pour illustrer ce propos. Le monde réel est terriblement dur, mais est ce pour autant une raison valable pour n'offrir que des niaiseries qui ne seront qu'un exutoire fragile sur grand écran?


L'ironie reste que Disney a su tirer parti du public d'aujourd'hui tout en se moquant de lui même et de ses anciens concepts via l'excellent Il était une fois  qui joue à merveille de ce contraste.


Nous nous attarderons aujourd'hui sur Taram et le chaudron magique avant de revenir dans quelques semaines sur le fameux  Dragon du lac de feu, deux métrages maîtrisés de bout en bout et relativement spectaculaires dans leur traitement.

 

Taram, un jeune valet de ferme, souhaite devenir guerrier. Aidé par le don de voyance que possède son fidèle compagnon, un porcelet nommé Tirelire, il doit à tout prix éviter qu'un mystérieux chaudron magique se retrouve entre les mains du maléfique Seigneur des Ténèbres. Dans sa quête, il rencontrera un petit personnage poilu, Gurki, ainsi que la charmante princesse Héloïse et le ménestrel Ritournel qui lui prêteront main forte tout au long de son aventure.


Taram et le chaudron magique est sorti en 1985 , après le plutôt faible Rox et Rouky. Il s'agit d'une œuvre à part dans l'univers Disney, cumulant de nombreuses tares. C'est l'un des plus gros échecs commerciaux de la firme avec un coût de 25 millions de dollars pour 10 millions de dollars seulement de recettes. Malgré de nombreuses innovations technologiques ( procédés APT et CAPS recourant pour la première fois à la numérisation et à l'usage de l'informatique dans un animé), il n'a su capter l'intérêt du jeune public, allant parfois jusqu'à l'effrayer par des scènes empreinte d'une cruauté assez crue.


Le métrage commence de manière classique, par la voix d'un narrateur extérieur expliquant les origines du fameux chaudron magique. Le film s'intitule The Black Cauldron en VO, et la traduction française , bien que tombant assez juste, trahit pourtant un postulat de départ plaçant délibérément le chaudron au centre de toutes les intrigues. De fait, Taram retrouvait une place équivalente aux autres personnages, ni plus ni moins importante que la plupart d'entre eux. Suite à cette présentation rappelant à postériori celle du Seigneur des anneaux de Jackson, le film commence sur le personnage de Dallben, sorte de vieux druide et maître de Taram qui est son valet de ferme. Pas grand chose d'extraordinaire dans ces quelques instants bucoliques. Dallben fait la cuisine sous les yeux de son chat gourmand (élément comique que l'on en reverra plus durant le reste du film d'ailleurs) et demande à Taram de bien vouloir nourrir Tirelire , la petite cochonne de la ferme alors que ce dernier ne rêve que d'aventures et inconsciemment de reconnaissance et d'émancipation, trouvant ses taches rébarbatives. Début classique donc et pourtant...

 

taram-et-le-chaudron-magique-1985-03Cette mise en scène , basée sur des aléas quotidiens est souvent de mise dans le microcosme de l'Héroïc Fantasy (HF). C'est une manière d'introduire les personnages phares à leur tout début, afin de se familiariser avec ces derniers tout en s'y attachant. Le héros principal relève d'une basse souche et sa condition primaire ne le destinait pas à priori au parcours initiatique qui allait s'offrir à lui et qui allait lui permettre d'évoluer et de mûrir. Les exemples sont nombreux en ce sens. On citera évidemment Tolkien et son Frodon pour les plus anciens mais aussi le Fitzchevalerie de Robin Hobb qui fut abandonné devant le château de Castelcerf pour y retrouver son père ou bien encore le jeune garçon d'Eragon et pourquoi pas Rand Al'Thor de la Roue du Temps. Tous ont des rapports privilégiés à la Terre et tous se sont retrouvés pris dans les fils d'un destin auquel ils n'aspiraient pas forcément.

 

Taram et le chaudron magique …. Merveilleux dessin animé riche de tant de bonnes idées et tranchant nettement avec l'habituel univers dégoulinant de Guimauve de la firme Disney de cette époque.


Le décor est donc planté. Ne manque évidemment plus que l'élément perturbateur qui proviendra dudit cochon sus nommé. Excellente idée ne pouvant que surprendre le spectateur qui , pour peu qu'il soit habitué à l'HF , ne pouvait s'attendre qu'à voir débarquer de sombres hères à cheval avec des capuches leur dissimulant le visage (Le seigneur des anneaux) , des trolls d'un genre spécial réduire en cendre le village tout proche (La roue du temps) ou nombre d'autres de situations devenues par un usage sans cesse recyclé de très bons clichés.

Il aurait été plus aisé de faire passer le tout par le chat de la maisonnée mais revendiquer un cochon (qui n'est pas une princesse déguisée, un sorcier victime d'un maléfice ou que sais je encore) 100% pur porc comme possédant des pouvoirs de précognition / prémonition devant mettre en branle le côté positif de la force lorsque le chaudron magique reviendrait faire son apparition restant un point de original ….


Il devient dès lors évident que les forces du mal vont vouloir s'emparer du précieux devin et que ce dernier va devoir être mis à l'abri de toute velléité. L'avantage d'avoir opté pour la gente porcine reste de nous offrir un personnage incapable de se défendre seul mais possédant un capital sympathie énorme pour le jeune spectateur, forcément enclin à vouloir lui aussi défendre quelque chose de petit, rose et dodu , affectueux au possible de surcroît. Tirelire va d'ailleurs représenter la seule véritable touche de gaîté colorée de cet animé. D'aucun me répondront que l'on pourra également voir la créature appelée Gurki qui apportera lui aussi une touche d'humour et de sentiments purs. Mais lorsque celui-ci est présenté pour la première fois, n'est ce pas sous l'apparence d'un voleur, manipulateur et menteur, nonobstant une lâcheté certaine à la moindre difficulté ? Son passif trouble ne peut dissimuler un besoin de se trouver un ami et un foyer, lui qui vit dans une forêt aux recoins parfois inhospitaliers. Sa couleur même tirant sur le gris et le marronâtre en fait une entité un peu sombre sans compter une manière de se déplacer assez alambiquée. Ce ne sera donc pas un allié de prime abord auquel on pourra se fier.


Il en va de même pour le peuple des lutins / fées qui, bien qu'arborant des couleurs primaires taram-et-le-chaudron-magique-1985-04un brin clinquantes dans un décor essentiellement souterrain cachent en fait un abîme de méfiance et d'auto défense, n'hésitant pas à se décharger de tâches non désirées (la surveillance momentanée de Tirelire) pour retrouver une tranquillité toute relative.


Le personnage de la princesse accompagnée de sa boule magique pourrait être un élément d'équilibre positif mais cette dernière reste trop jeune et parfois trop imbue de son importance pour remporter l'adhésion de tous, c'est d'ailleurs l'un des personnages les moins intéressant de cette aventure, son utilité première n'étant que de permettre à trama de trouver l'épée enchantée d'un roi déchu et de pouvoir faire avancer l'intrigue en sortant du château.


Le ménestrel , autre figure quasi existentielle de l'HF (Thom dans La roue du temps / une amie précieuse de Fitz qui jouera un rôle plus qu'important), personnage généralement haut en couleurs et porteur d'une certaine gaîté ne se démarquera pas ici du lot. Personnage âgé, rencontré par hasard, Ritournel est d'abord plus intéressé par sa propre survie que par celle du groupe. Taram lui-même, pourtant héros éponyme ne brillera pas par son altruisme, Tirelire étant par sa faute emportée par les vouivres en cours de route, l'obligeant à se rendre dans la forteresse du seigneur des ténèbres. Quid alors du druide de départ ? Ce dernier aurait très bien pu prendre la route avec Taram mais il préfère envoyer ce dernier accomplir la basse besogne pour préparer leur arrivée … Que fabrique t il pendant tout le film ? On ne le saura pas. Ces pouvoirs sont ils si importants ? Il est capable de lire dans une bassine de liquide le futur et le passé mais aussi le présent, grâce à Tirelire. Passionnante faculté que Taram reproduit sans peine alors qu'il ne possède à priori aucune prédisposition paranormale.


Tirelire reste donc l'unique personnage non ambigu de tout le métrage, sa survie restant le leitmotiv principal sur les deux tiers de la projection. D'ailleurs, lorsque Tirelire ne sera plus indispensable, celle-ci sera simplement renvoyée dans peinâtes avec une simple luciole (grognonne, d'accord) pour tout accompagnateur. Le comble et que cette dernière mènera sa tâche à bien sans encombre là où trois humains et une boule de poils ne seront parvenus à rien.


Voilà ce qu'il en est pour les personnages dits " positifs ". La force de ce film réside cependant dans le traitement à la fois graphique et psychologique des bad guys. Ce sont eux qui donnent de la profondeur et qui parviennent à impressionner le spectateur. Reste le fait étonnant qu'ils soient aussi imposants dans un Disney, et de surcroît dans un film tout public. Taram à mon goût reste le seul film à ce jour qui aurait pu prétendre à un PG-13 à sa sortie (on pourra aussi citer Ursula , la sorcière des mères de la Petite Sirène qui entre allusions sexuelles et manifestations de sorcellerie aux empreints gothique possédait de quoi terrifier les plus jeunes, sans compter un final magnifique où elle se fait littéralement embrocher par une carcasse de navire).


taram-et-le-chaudron-magique-1985-05Les personnages négatifs sont le parfait reflet de ceux dits positifs. Gurki , pour commencer par lui, trouve son reflet dans le gnome servile servant de valet au Seigneur des Ténèbres. Il est assez comique et ressort dans ces ambiances lugubres et sombres, c'est également le seul à avoir quelques touches de couleurs vives en opposition à Gurki qui à une présentation assez sombre dans un monde à priori pacifique. Le crapaud possède lui aussi une ambivalence de caractère car servant le plus fort avec l'espoir de ne pas le décevoir mais aussi de sauver sa propre vie. Il reste d'ailleurs amusant de constater le court affrontement de ces deux personnalités lors du final. La psychologie de ce dernier permet malgré un aspect repoussant de ne pas en faire un individu effrayant, les plus jeunes pouvant s'identifier à lui pour peu qu'ils vivent eux-mêmes un complexe d'infériorité. D'un autre côté, attendre la mort de l'individu honni comme seule échappatoire pour vivre sa propre existence sans crainte laisse un arrière goût amer dans la bouche… En comparaison, les hyènes du Roi Lion n'avaient pas eu besoin d'attendre la mort de Scar pour s'affirmer, elles ont toujours conservé leur individualité.


Le Seigneur des ténèbres reste l'atout majeur de ce film. Véritable opposé (sans surprise aucune) maléfique à la force positive que représente Taram, il est sans aucun doute le vilain le plus réussi de toute l'écurie Disney. Graphiquement tout d'abord, il ne cache en rien sa nature profonde. Couleurs chaudes délavées, longs habits, cornes, musique appropriée, il ne se démarque jamais de son but initial et reste fondamentalement mauvais. Le summum reste les mains squelettiques (dont on retrouve une réminiscence certaine dans sortilège de capture de voix d'Ursula, via ces deux grandes mains décharnées qui dépouillent Ariel d'une partie de son identité) et ce visage très crânien dont les yeux ne sont que deux points rouges incandescents. L'affrontement avec le chaudron finir à d'appuyer cette volonté de cauchemar macabre. Le nom lui même renvoie à une atmosphère malsaine. Impossible de lutter contre une entité dont on ne connaît pas l'identité. Impossible de focaliser sa peur et de la dépasser. Ce nom générique renvoie à l'essence même du mal, un peu comme Le Ténébreux de La roue du Temps d'ailleurs.


Les vouivres elles mêmes (une paire, comme les murènes d'Ursula ou les crocodiles de Médusa dans Bernard et Bianca… ) offrent un aspect terrifiant. Ailes de grandes envergures avec griffes, une teinte violette assez terne, des yeux blancs dénués de bonté mais riche d'une intelligence perfide sans compter de redoutables serres. La fameuse scène où elles s'amusent à terroriser Tirelire est mémorable à plus d'un titre. Tout d'abord, l'un des adjuvants se fait maltraiter plus que de raison, les vouivres semblant prendre plaisir à jouer avec leur proie et le fait que Taram essaie de sauver sa protégée n'arrange rien, puisqu'il se fait ruer de coup par ces dernières. Mieux encore, pour la première fois jusqu'à cet animé, un personnage principale est montré désespéré et même mieux,avec du sang consécutif à ses blessures. Jamais jusqu'à maintenant cela n'avait été vu. Disney oblige, la violence et la mort sont plus suggérés que réellement montrés. Blanche Neige doit se faire arracher le cœur, on trouve un palliatif. La mère de Bambi meurt, on trouve un parti pris qui décuple l'émotion, chacun pouvant le ressentir selon son propre vécu. Mais ici, on voit clairement le sang couler. Même si cela ne dure qu'un bref instant, cette scène à au moins le mérite de coller à la réalité.


Pour clore ce chapitre sur les bads guys, il est indispensable de citer l'armée de brutes travaillant pour le Seigneur des ténèbres, assez classique et constitué de gars musculeux très forts lorsqu'ils sont en groupes, assez faibles quand ils se retrouvent devant quelque chose qui les dépassent. Notons aussi l'armée des morts. Taram est aussi le seul Disney où l'on peut voir autant de cadavres ne servant pas uniquement pour le décorum mais ayant un rôle à jouer véritable au niveau du scénario.


Le trio des sorcières n'est pas en reste , véritable métempsycose des moires de l'antiquité grecque. Elles influent directement sur le destin de nos héros à plusieurs reprises. Même si elles apparaissent souvent ironiques, elles ne peuvent prétendre au statut véritable d'élément comique. Elles sont manipulatrices, susceptibles et contrairement à d'autres jeteuses de maléfices de l'univers Disney à l'instar de Madame Mim, elles possèdent réellement de puissants pouvoirs; capables même d'en imposer au chaudron. On repensera aussi au trois sœurs du Choc des Titans, la trinité maléfique semblant avoir une place de choix lorsqu'il s'agit de montrer un tel groupe. Ce triptyque ne dérogera pas à la règle cependant et conservera lui aussi un caractère ambigu car bien que jouant avec les désirs refoulés de Taram, il sera d'une aide précieuse pour en finir avec l'ennemi principal.


Taram et le chaudron magique, outre un casting de personnages fameux, se démarque aussi de par son atmosphère générale. Rien n'est montré comme heureux dans ce film et tout est un rappel à la lourde tâche de surveiller Tirelire. Plus on avance dans le métrage, plus les décors sont torturés, mais cette évolution est menée de manière progressive. On commence par la sécurité relative de la ferme avec ses ambiances bucoliques puis l'on poursuit par l'intérieur de la dite ferme, qui cloisonne déjà l'œil du spectateur pour poursuivre dans des forêts aux couleurs toujours plus terne et à la végétation se raréfiant jusqu'à n'offrir plus que des arbres décharnés. On continue dans le château du Seigneur des ténèbres, modèle du genre pour , après la fuite, atterrir sous terre puis dans le territoire des sorcières (dont les visuels auraient pu être recyclés dans le premier opus de l'Histoire sans fin).

 

Cette sensation de malaise est renforcée par l'apparence menaçante du chaudron et par lataram-et-le-chaudron-magique-1985-02-g résurrection de l'armée des morts. L'animation des squelettes pour de l'animation reste exemplaire, le tout baignant dans un nuage verdâtre nauséabond de plus bel effet qui se répand exponentiellement dans le château. On soulignera aussi le soin des cellos quand à la retranscription de la tombe du roi oublié. Enfin, un autre élément caractérise ce film outre son générique de fin (jusqu'à maintenant, toutes les équipes techniques étaient présentées au début du métrage) c'est l'absence totale de chansons. Peut être l'histoire ne s'y prêtait elle pas, quoique voir le Seigneur des ténèbres entonner un hymne à sa rage de vouloir prendre le contrôle de toute la contrée pour des raisons obscures (travers que l'on retrouve souvent chez les apprentis dictateurs; ces derniers veulent le pouvoir et quand ils l'ont, que font- ils ? Ils s'ennuient. Pour illustration, il suffit de compulser le formidable TOP BD de feu Lug Editions « Fatalis Imperator ») ou même Taram exprimer sa volonté de devenir un ardent défenseur de la veuve et de l'orphelin… Ces écueils sont astucieusement évités, soit par l'usage de l'allégorie, soit par le recours à une fantasmagorie graphique salvatrice. Il reste d'ailleurs amusant de souligner que le seul personnage musical du film, Ritournel , possède une lyre dont les cordes se rompent à chaque mensonge de ce dernier... Force est de reconnaître que l'aspect mature du film s'en trouve renforcé et que le rythme n'est jamais brisé dans son élan car à cette période, les musiques et les chansons dans un Disney ne parvenaient pas à être aussi bien intégrées que dans La Petite Sirène ou Le Roi Lion. Pixar l'a bien compris de son côté aussi puisque les chansons des persos titres n'existent simplement pas... à une ou deux exceptions près mais sur une demi douzaine de films, cela reste anecdotique. De toute manière, un détour chez Myazaki, avec des histoires s'étalant sur plus de deux heures, achèvera de convaincre que le non recours à la chanson n'entrave en rien la force des sentiments exprimés, à l'image du Château Ambulant par exemple qui reste redoutable dans ce domaine.


Beaucoup de qualité donc dans Taram et le chaudron magique,mais qu'en est-il réellement du traitement de Taram et de sa destinée ? Et bien, là aussi, la réussite est au rendez vous. Tout parcours initiatique commence par un élément perturbateur et nous avons déjà démontré que cette histoire ne fait pas exception. Néanmoins, le dit parcours doit permettre au pré-adolescent de se développer et d'accomplir ses rêves ; San Goku est devenu un grand guerrier, Seiyar est devenu le défenseur d'Athéna, Brandon Routh et Harry McDowell et leur évolution fulgurante au sein de l'Organisation et j'en passe tant les exemples sont nombreux.

 

Pour Taram, on peut donc logiquement s'attendre à le voir prendre son courage à deux mains, surtout une fois l'épée découverte, et devenir le protecteur du petit groupe. Disney parvient alors à nous prendre à rebrousse poil et sacrifie le petit Gurki, être secondaire sur lequel personne n'aurait parié un kopeck, bien que son chemin soit similaire à celui de Taram qui deviendrait alors sa Tirelire personnelle. Le final est riche de sens avec ces deux personnages qui choisiront l'amitié plutôt que leur rêve immédiat de manière à se retrouver tous en groupe sur un plan de nouveau coloré, sous les yeux de Dallben.


Un Disney au message fort, traité de manière non consensuelle, avec un boogeyman d'exception et un plaisir visuel de tous les instants. Comme souvent un film mal compris à sa sortie car peut être d'avant-garde et sortant des sentiers battus mais méritant une seconde chance dans votre dvdthèque tant les niveaux de lecture sont nombreux et le plaisir renouvelé à chaque vision.

 

 

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commentaires

L
Rox & Rouky "faiblard" et "ennuyeux" ?! N'importe quoi, c'est 1 des + touchant (les expressions des personnages sont très réussies).. Après ok il est simple et avec quelques scènes bofs (quand les oiseaux chassent le vers c'est 1 peu long des fois, pas utile) mais c'est pas grave, ça reste 1 chef-d'oeuvre je trouve. <br /> Bon après pour ce qui est de "Taram et le chaudron magique", puisque c'est le sujet de ton post, je suis d'accord avec toi. Il est tellement riche visuellement (dont le jeu d'ombres/lumière), et du Heroic Fantasy chez Disney... Mais bon dès qu'on essaye d'être différent, les américains ça ne leur plait pas... Trop sombre pour des petits d'accord (quoique ça va), mais dommage que les + grands n'ont pas + été le voir, il ne méritait son échec commercial. Mais j'avais entendu qu'en vhs (et dvd), ça avait rattrapé l'échec commercial. Bref un film à r(e)voir.
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